lundi 26 août 2013

Cul et chemise

 
 
 
- Ah Cary Grant… La classe incarnée, l’élégance faite homme… Tu sais que la première fois que je t’ai vu, tu m’as immédiatement fait penser à lui ?

- C’est gentil ça… Moi tu m’as fait penser à Sophia Loren la première fois.

- Je croyais que c’était Audrey Hepburn ?

- Audrey Hepburn aussi, pour ton côté espiègle, mais surtout Sophia Loren ce soir-là, avec cette robe noire qui te faisait une ligne… des courbes à réveiller le Vésuve…

- Ah oui d’accord… Je te parle de ton élégance et tu me réponds que tu te souviens de mon décolleté... Il te manque encore un peu de classe pour arriver au niveau de Cary mon chéri…

- Pas du tout, je ne parlais pas que de ton décolleté, je parlais de tout le reste ! Je parlais SURTOUT du reste en l’occurrence, oui tu avais un cul magnifique dans cette robe, c’est mal de le dire ? Et puis  arrêtons l’hypocrisie deux minutes, tu crois que Cary Grant il ne regardait pas le cul des jolies femmes qu’il croisait ?

- Non, il regardait leurs fesses.

- C’est pareil, arrête de jouer sur les mots…

- Non, justement, ce n’est pas du tout pareil Raoul ! L’élégance d’un homme, c’est le fruit d’une certaine sensibilité, que nous les femmes savons reconnaître puisque nous avons la même. Nous, par exemple, nous regardons vos fesses, comme les élégants, pendant que vous, vous regardez notre cul. Et ne dis pas le contraire, je te connais par cœur !

- Parce que tu crois que Cary Grant sous son vernis élégant, il n’était pas comme les autres ? Il était peut-être très fort pour sublimer la fesse à vos yeux, mais aux siens, le seul sublime qui comptait, c’était le cul ! Le cul, le cul, le cul !

- Et il avait raison ! Parce qu’on adore qu’un homme nous regarde le cul mais uniquement s’il a su nous regarder les fesses avant. C’est un peu comme si l’élégance était la meilleure introduction possible avant l’ivresse, elle permet la fonte de toutes les barrières les plus froides, tu arrives à comprendre ou ça te dépasse Monsieur le radar automatique ?

- Le radar automatique ?

- Tu crois que je ne te vois pas flasher sur la moindre ondulation à talons ?

- Parce que toi tu ne flashes pas sur les sourires en coin, les mèches rebelles, les regards pleins de douches brûlantes et de matins tièdes ? Ne te fous pas de moi Simone s’il te plaît…

- Mais je flashe raisonnable moi ! Toi tu flashes toutes les trois secondes !

- C’est quand même pas de ma faute si elles me sourient !

- Mais elles te sourient pour être tranquilles ! C’est comme si quelqu’un gardait le doigt appuyé sur ta sonnette pendant des heures, soit tu lui ouvres, soit il continue pendant toute ton indifférence ! Alors nous, avec les radars automatiques, on est gentilles, on sourit, lui il est content pour la journée, il a l’égo aussi gonflé que la testostérone, et nous, on a le bouton libéré !

- Le bouton ?

- De la sonnette espèce de malade !

- Et pourquoi n’oseraient-elles pas m’éconduire ?

- Tu flashes sur tellement de femmes que tu es persuadé qu’elles ont toutes perdu leur permis de t’éconduire Raoul !

- Dis donc, mets-toi de profil là…

- Quoi ?

- Si je te dis que depuis que tu as passé la cinquantaine tu as pris des fesses plutôt que « pris du cul », je suis élégant ou pas ?



Raoul a gardé l’empreinte des stries de la poêle sur le front jusqu’au printemps d’après.







Franck Pelé – Août 2013 – textes déposés à la SACD

 
 
 
 

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