samedi 2 novembre 2013

On n'est pas aux pièces !





- C'est ici pour mettre la pièce ?

- Ah non c'est pas pour mettre la pièce ici...

- Pardon mais c'est la première fois.

- Bah oui je vois...

- Mais alors comment ça marche exactement ?

- Tout dépend de la qualité du service que vous recherchez et du nombre de pièces dont vous disposez.

- Qu'est-ce qui se pratique le plus d'habitude ?

- Le service trois-pièces.

- Oh je dois bien avoir ça...

- J'en suis sûre oui.

- Et alors donc, on fait quoi avec nos trois pièces ?

- Il faut introduire la plus grosse et la faire fructifier jusqu'à ce que les deux autres en explosent de joie.

- C'est à dire ? C'est un peu comme jouer en bourse ?

- Un peu oui...

- Et vous vivez de ça ?

- Ah moi non mais certaines femmes vivent de ça oui.

- Elles vivent de quoi exactement ?

- De l'argent qu'on leur donne pour placer certains avoirs en lieu sûr.

- Donc c'est bien ce que je dis, vous le mettez là votre argent, c'est donc bien là qu'on met les pièces !

- Ah non là c'est pour les placements des partenaires, moi je place ailleurs.

- Mais vous disiez pourtant que c'était un lieu sûr ?

- Oui, si vous placez judicieusement vous récoltez forcément, vous en aurez toujours pour votre argent.

- Bon, moi je vais juste aux toilettes et on m'a dit qu'il y avait une dame à qui il fallait donner une pièce, alors je ne comprends plus rien...

- Oui, et bien moi je suis une cliente du restaurant et je viens juste de m'asseoir en sortant des toilettes pour chercher quelque chose dans mon sac alors si vous vouliez bien lâcher mon collant, ce serait très gentil de votre part.

- Vous n’avez pas de culotte ? Pourquoi vous n’avez pas de culotte ? C’est bien pour pouvoir accueillir les pièces plus facilement, non ? Et le collant c’est pour que le chat n’attrape pas froid n’est-ce pas ?

- Bon virez immédiatement votre médiocrité de là sinon j’appelle le propriétaire du chat et il ne boit pas que du petit lait… sauf quand il a l’occasion de se faire la main sur des grands malades évidemment, là, il savoure…

- Je peux quand même mettre une pièce pour vous remercier ?

- Raoul, y'a un malade qui m'a pris pour la Dame Pipi !

- Et si je mets ma pièce, vous pourriez me chanter une chanson ?

- Raoul !!!

- Quoi ?

- Tu peux dire à ce malade de lâcher mon collant ?

- Qu'est-ce que vous faites avec le collant de ma femme vous ?

- C’est vous le proprio ? Dites donc c’est pas très facile d’accès pour payer, votre histoire là hein…

- Il veut me faire chanter !

- Hein ? Il a pris des photos ?

- Mais pas du tout, je demandais à votre femme si elle pouvait me chanter une chanson et je me proposais de lui laisser une petite pièce.

- Mais vous êtes qui vous ? (Il le décolle du sol et le secoue) Qui êtes-vous espèce de décérébré ???

- Hector Valdarim enchanté, j'imagine que vous êtes le trois-pièces attitré de Madame ? C'est une bien belle tirelire que vous avez là.

- Dis donc le suicidaire, tu m'appelles encore une fois tirelire et je te creuse tellement la tronche que t'auras l'impression de regarder la vie de l'intérieur du Vésuve ! Maintenant tu me lâches la culotte et tu dégages !!

- La culotte ? Mais vous n’en avez pas ! Vous êtes une sacrée baratineuse vous quand même !

- Change de département, viiiiite !!!

- Mais vous n'êtes pas la Dame Pipi alors ?

- Raoul !!!

 


 

dimanche 13 octobre 2013

Hair



- Quand vas-tu te raser Raoul ? Que je puisse enfin poser mes lèvres sur les tiennes sans avoir à faire subir à mon visage un terrain aussi fourni ?

- Tu m'enlèves les mots de la bouche Simone...


F.P.

jeudi 29 août 2013

Diamant sur canapé




- Tu sais que t’es bien foutu jeune chien fou ?

- Merci Simone… Et encore, là tu vois que les pectoraux, en ce moment je travaille les fessiers.

A peine Simone a-t-elle répondu à cette phrase bourrée de sous-entendus que son compagnon de jeu la saisit et entame une violente secouée moyennement amicale, qui se termine dans un cri terrible déchirant la nuit :

- Mais t’es malade ?!! Qu’est-ce que t’as fait à ma jambe ?

- Bah tu m’as dit « j’ai envie que tu me démontes »…

- Mais pas du tout, je t’ai dit « j’ai envie que tu me les montres » !

- Quoi ?

- Tes fessiers !

- Ah… pardon, j’avais pas compris ça…

(Elle l’imite avec une voix de benêt)

- « J’avais pas compris ça… »   Dis donc Musclor, t’as autant de neurones que de distinction !

- De quoi ?

- Et même si je t’avais dit « j’ai envie que tu me démontes », ce qui, soit dit en passant, aurait signifié tirer un trait sur des années d’élégance, c’eût été une métaphore !

- Une quoi ?

- Une image !!! Si les femmes se faisaient démonter comme tu viens de le faire, tu imagines le nombre de pièces détachées qu’il y aurait dans le monde ?

- Mais moi je suis très premier degré en fait…

- Bah oui je vois ! C’est même pas du premier degré à ce niveau-là, t’es en température négative ! T’as la lucidité qui gèle à la naissance ! Vous êtes quand même méchamment graves toi et tes copains de la génération YouPorn hein ! Avant on avait les machos, maintenant on a les machos qui ne comprennent même pas les dialogues des pépites qu’ils regardent ! Avant on avait quand même des amants, ils avaient peut-être la moustache et la fessée facile mais ils nous laissaient en un seul morceau ! Maintenant on a des bouchers, des peintres, des spéléo de la tuyauterie ! Ça vous défriserait la toison d’avoir un peu de délicatesse ? On ne peut pas se faire plaisir à l’ancienne ? Comme on fait depuis toujours ? Non, génération geek, il faut du progrès, faut démonter, plus loin,  plus haut, plus fort, et alors demain, c’est quoi le programme ? Tu vas te raser le crâne, te l’enduire de graisse à traire et aller poser à côté du point G pour publier ta photo sur Facebook ? Faudrait déjà que tu saches le trouver espèce d’entrepôt vide !

- Je suis sûr que bientôt on entrera « point G » sur une caméra frontale GPS et on trouvera direct.

- Mais ça aussi c’est une image, le point G ! Tu crois quoi ? Qu’on a un petit point G dans le ventre entouré en rouge avec écrit « vous êtes ici » ? Mais ta vie c’est un ascenseur qui descend perpétuellement vers le néant mon pauvre ami ! Et pourquoi tu m’as amené chez toi ? Qu’est-ce que tu as vu chez moi ? Une cougar ? Une MILF ?

- Bah ouais, un peu une MILF…

- Mais je suis tout le contraire Capitaine Caverne ! Je suis une WILD ! Woman I Love to Discover ! Une île déserte et luxuriante, élégante et pas sur la carte, sauvage et belle ! Toi, t’as du caviar et tu l’étales sur le Big Mac indigeste de ton animalité décérébrée !!!

- Mon quoi ?

- Mais regarde dans quel état tu m’as mise !!

- Je suis désolé…

- T’es désolé ? Mais ça me fait une belle jambe que tu sois désolé ! Comment je fais moi maintenant ?

- Bah tu vas un peu boiter c’est sûr…

- …Dis donc Brutus… C’est quoi « beaucoup boiter » pour toi ?



F.P. - Août 2013

lundi 26 août 2013

Cul et chemise

 
 
 
- Ah Cary Grant… La classe incarnée, l’élégance faite homme… Tu sais que la première fois que je t’ai vu, tu m’as immédiatement fait penser à lui ?

- C’est gentil ça… Moi tu m’as fait penser à Sophia Loren la première fois.

- Je croyais que c’était Audrey Hepburn ?

- Audrey Hepburn aussi, pour ton côté espiègle, mais surtout Sophia Loren ce soir-là, avec cette robe noire qui te faisait une ligne… des courbes à réveiller le Vésuve…

- Ah oui d’accord… Je te parle de ton élégance et tu me réponds que tu te souviens de mon décolleté... Il te manque encore un peu de classe pour arriver au niveau de Cary mon chéri…

- Pas du tout, je ne parlais pas que de ton décolleté, je parlais de tout le reste ! Je parlais SURTOUT du reste en l’occurrence, oui tu avais un cul magnifique dans cette robe, c’est mal de le dire ? Et puis  arrêtons l’hypocrisie deux minutes, tu crois que Cary Grant il ne regardait pas le cul des jolies femmes qu’il croisait ?

- Non, il regardait leurs fesses.

- C’est pareil, arrête de jouer sur les mots…

- Non, justement, ce n’est pas du tout pareil Raoul ! L’élégance d’un homme, c’est le fruit d’une certaine sensibilité, que nous les femmes savons reconnaître puisque nous avons la même. Nous, par exemple, nous regardons vos fesses, comme les élégants, pendant que vous, vous regardez notre cul. Et ne dis pas le contraire, je te connais par cœur !

- Parce que tu crois que Cary Grant sous son vernis élégant, il n’était pas comme les autres ? Il était peut-être très fort pour sublimer la fesse à vos yeux, mais aux siens, le seul sublime qui comptait, c’était le cul ! Le cul, le cul, le cul !

- Et il avait raison ! Parce qu’on adore qu’un homme nous regarde le cul mais uniquement s’il a su nous regarder les fesses avant. C’est un peu comme si l’élégance était la meilleure introduction possible avant l’ivresse, elle permet la fonte de toutes les barrières les plus froides, tu arrives à comprendre ou ça te dépasse Monsieur le radar automatique ?

- Le radar automatique ?

- Tu crois que je ne te vois pas flasher sur la moindre ondulation à talons ?

- Parce que toi tu ne flashes pas sur les sourires en coin, les mèches rebelles, les regards pleins de douches brûlantes et de matins tièdes ? Ne te fous pas de moi Simone s’il te plaît…

- Mais je flashe raisonnable moi ! Toi tu flashes toutes les trois secondes !

- C’est quand même pas de ma faute si elles me sourient !

- Mais elles te sourient pour être tranquilles ! C’est comme si quelqu’un gardait le doigt appuyé sur ta sonnette pendant des heures, soit tu lui ouvres, soit il continue pendant toute ton indifférence ! Alors nous, avec les radars automatiques, on est gentilles, on sourit, lui il est content pour la journée, il a l’égo aussi gonflé que la testostérone, et nous, on a le bouton libéré !

- Le bouton ?

- De la sonnette espèce de malade !

- Et pourquoi n’oseraient-elles pas m’éconduire ?

- Tu flashes sur tellement de femmes que tu es persuadé qu’elles ont toutes perdu leur permis de t’éconduire Raoul !

- Dis donc, mets-toi de profil là…

- Quoi ?

- Si je te dis que depuis que tu as passé la cinquantaine tu as pris des fesses plutôt que « pris du cul », je suis élégant ou pas ?



Raoul a gardé l’empreinte des stries de la poêle sur le front jusqu’au printemps d’après.







Franck Pelé – Août 2013 – textes déposés à la SACD

 
 
 
 

mardi 2 juillet 2013

En voiture Simone - Les origines




- Je n'ai jamais trompé mon mari.
- Ah moi si...
- Ah bon ? Tu as déjà trompé ta femme ?
- Non, j'ai trompé ton mari.
- Je ne comprends pas...
- Je lui ai dit que je couchais avec toi alors qu'il n'y a jamais rien eu entre nous.
- Mais t'es malade ! C'était quand ça ?
- Oh y'a longtemps...
- Et il n'a rien dit ?
- Non... Il m'a juste demandé ce que tu me faisais. Je ne voudrais abuser de la situation mais il m’a même dit que ça l’arrangeait.
- Que tu couches avec moi ?
- Oui
- … Mais… Ce que je te faisais ? Qu'est-ce que tu as dit  ?
- Que tu faisais tout ce qui était possible de faire avec un talent absolument incroyable. Du coup, on pourrait peut-être vérifier...
- Vérifier quoi ?
- La qualité de mon intuition…
- Mais t'es malade ! Et s'il l'apprend ?
- Mais il le sait déjà !
- Tu as inventé tout ça pour me choper ?
- Te choper, te choper, comme tu y vas... Assouvir un vieux fantasme plutôt...
- Parce que ça fait longtemps que tu as envie de moi ?
- Dix ans... Depuis qu'on se connaît. 
- Je n’avais rien vu… Je suis vraiment naïve…
- Tu n’avais pas les yeux en face des trous c’est tout…
- ça veut dire quoi ça ?
- Que tu étais naïve.
- Mais tu sais… Je ne fais pas tout ce que tu penses…
- On dirait une voiture toutes options qui parle en se basant sur l’expérience de son seul conducteur.
- C’est-à-dire ?
- Que ton mari n’a jamais cherché qu’à te conduire sans savoir tout ce dont tu étais capable.
- Et comment tu sais de quoi je suis capable Monsieur le roi du choping ? Tu sais, les femmes adorent le choping, c’est vrai, mais elles détestent qu’on ne sache pas les choper.
- Avec ton GPS ultra-sensible, tu sauras me dire exactement où je suis, ton intérieur cuir te rendra aussi élégante que brûlante, pas très économe à la pompe, avec toi on va très loin, et ce coffre arrière est bien plus plaisant qu’il n’en a l’air…
- Tu es complètement fou… Moi je suis une petite berline, un petit plein me suffit, je roule sans excès, dans les limitations de vitesse, je klaxonne rarement mais si on me colle un peu trop longtemps, je peux descendre en plein milieu de la route, je n’ai qu’un seul réservoir, si tu te trompes, je peux tomber en rade ou caraméliser le moteur, comme toutes les voitures respectables, je n’avale pas l’essence, je la consomme, c’est la combustion qui se fait à l’intérieur de mon moteur qui fait avancer l’ensemble,  j’ai les airbags très sensibles et j’ai horreur qu’on me triture les clignotants. Tu es sûre que tu as envie de monter ?
- Je peux ?
- Quoi ?
- Conduire. Voir ce que cette voiture a dans le ventre…
- D’accord mais avec soin…
 
Raoul commença alors à explorer les secrets de Simone avec un art aussi délicat qu’inégalable.

- Raoul… Mais… Qu’est-ce que tu me fais ? C’est quoi ce bouton ? Je m’ouvre de partout… regarde !
- Tu as l’ouverture centralisée, un exemple de ces choses que tu ignorais…
- Mais mon mari s’est toujours installé au même endroit, en passant par la même porte !
- Il n’avait peut-être qu’une seule clé, celle qui démarrait la gentille berline….
- Et toi ?
- Moi j’ai la clé de la voiture de luxe, racée, élégante, puissante, qui dévore les espaces et les kilomètres… Une vraie bombe… La classe ultime. 
- Et on peut aller loin avec toi à mon volant ?
- Jusqu’au bout de la nuit…
- Alors allons-y...
- En voiture Simone...
 
 
 
F.P. - juillet 2013

lundi 1 avril 2013

La féline



- Qu'est-ce que tu fais chérie ? Tu descends ?

- Non, je lézarde au soleil...

- Et quand tu auras fini de faire la chatte sur un toit brûlant, tu ne veux pas venir me gratter le dos dans le jardin ?

- Non merci Raoul.

- Tu ne voudrais pas essayer de devenir un peu plus chienne Simone ?

- C'est ça voilà... Genre croqueuse qui brise ses chaînes à l'appel du loup ? Désolé mon chéri mais je suis féline moi, et si ça ne te suffit pas, je te conseille vivement d'aller hurler ailleurs !

- Mais c'est avec toi que j'ai envie de ronronner..

- Je ne te fais plus d'effet de toutes façons, tu préfères aller voir toutes ces jeunes avec leur mode sans caractère... Elles n'ont aucun genre...

- Tu n'aimes pas les chattes épilées ?

- Et bien non ! Ce n'est pas naturel ! On peut se tailler un peu le poil mais franchement, quand j'en vois certaines, elles n'ont que la peau sur les eaux, ce ne sont plus des chattes, ce sont des skins ! Et alors bonjour quand ça repousse, là, tu les as tes chiennes...

- Simone... Invite-moi chez toi... Un petit lait -fraise... Et j'adore ta nouvelle couleur... T'as un côté Julianne Moore en rousse, c'est craquant...

- Je t'ai attendu toute la nuit Raoul mais tu avais probablement d'autres chattes à fouetter... C'est trop tard maintenant.

- J'ai passé la nuit en cellule de dégrisement...

- Pfff...  Et pourquoi ?

- Je n'ai rien pu faire, la nuit, tous les chats sont gris.



F.P. - mars 2013